vendredi 15 janvier 2016

Puerto Apache - Juan Martini

Dans les ruelles de Buenos Aires, le rat ratisse la crasse des hommes.

"Puerto Apache" est un roman de Juan Martini, un auteur argentin considéré comme incontournable au pays des Pumas*.

Dès le début ça cogne sec, dur et fort. Nous découvrons le personnage principal de l'histoire, le Rat, en mauvaise posture face à trois hommes. Ficelé à une chaise, il subit un interrogatoire, rythmé par des beignes. Qui sont ces types ? Quels morceaux essayent-ils de lui faire cracher ? Le Rat n'en a aucune idée. Quand ils sont arrivés chez lui, il a d'abord cru à des flics, il les a suivis sans ménagement pour ne pas inquiéter sa femme Jenifer et leurs deux enfants. Depuis, ils lui démolissent méchamment le portrait à s'en casser les doigts contre ses pommettes. La gueule enflée et qui pisse le sang, il va tout de même réussir à se sortir de cette mauvaise passe en profitant d'un moment d'égarement de ses tauliers. Libéré, il n'a plus qu'une idée en tête : trouver le commanditaire de cette expédition punitive pour se venger. Il ne va pas tarder à soupçonner son patron, le Pélican, un caïd de Buenos Aires.

En suivant le Rat, nous faisons la connaissance d'un bidonville, appelé Puerto Apache, sorti de terre en 2000, conçu et gouverné par une poignée d'hommes qui se font appeler la Première Junte, et dont le père du Rat se trouve à la tête. Les habitants de Puerto Apache se définissent comme "un problème du XXIème siècle".  Mais à la lecture nous nous demandons qui est réellement le problème ? Une société qui rejette une population ou bien une population qui tente de survivre ? Bref, dans le dédale des ruelles pourries de Puerto Apache vit une faune livrée à elle-même, gagnant sa croûte dans l'illégalité. Mais comme souvent, aux abords de cette zone de non-droit, flirtent les donneurs de leçons, ces gens bien droit dans leurs bottes qui se font appeler politiciens ! Le Rat, en remontant le fil de l'histoire, va découvrir la vraie nature des hommes qui l'entourent, un imbroglio puant. Que l'on soit de Puerto Apache ou d'ailleurs, les hommes restent les mêmes.

Vous avez compris, cette lecture sent la rue, le danger qu'elle amène, l'embrouille et la traîtrise qu'elle provoque par l'appât du gain. Rester dans ses entrailles c'est risquer d'y laisser sa vie, la seule façon d'y survivre est de trouver une échappatoire. Mais comment quitter ce monde quand celui d'en face demeure un ennemi ? C'est tout cela que met en lumière Juan Martini, dans un roman qui vous prend à la gorge, aux tripes, et vous traîne dans le dédale d'un ghetto comme il en existe tant à travers le monde.
YB.  

*Pumas : Fait référence à l'équipe nationale de rugby argentine.

Quatrième de couverture :

Puerto Apache est un bidonville autogéré en plein cœur de Buenos Aires, sur la rive du río de la Plata. Ses habitants sont pleinement conscients de leur condition d'exclus et se revendiquent comme étant « un problème du XXIe siècle ». Parmi eux, le Rat, qui vit de petits larcins. Mais son activité la plus lucrative, c'est de travailler pour un caïd de la ville : il doit retenir des séries de nombres, sans les noter, et les restituer telles quelles à un autre dealer. Il ne sait pas à quoi tous ces chiffres correspondent, mais qu'importe, l'affaire paie bien... Jusqu'au jour où il se retrouve pieds et poings liés sur une chaise, passé à tabac par des inconnus qui voient en lui plus qu'un simple maillon de la chaîne. Qui veut la peau du Rat ? Pourra-t-il trouver refuge dans les rues de Puerto Apache ?

Juan Martini est un écrivain argentin, né en 1944. Pendant la dictature militaire, il s’exile en Espagne et dirige une collection de romans noirs dans une grande maison d’édition. Il vit actuellement à Buenos Aires, où il donne des ateliers d’écriture. Il est l’auteur d’une quinzaine de romans et recueils de nouvelles. Son œuvre, profondément inspirée par le genre policier et caractéristique d’une certaine littérature de l’exil, est considérée comme incontournable du panorama littéraire argentin.

Puerto Apache, Asphalte Editions, octobre 2015.

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